Le secteur automobile allemand est le moteur de l'économie allemande. Si on devait le résumer en quelques chiffres, en 2021 c’était 436Mds€ de CA, dont 274Mds€ à l’export et représentait 11,4 % du PIB allemand (
CCI France Allemagne). Cependant, la locomotive allemande s’essouffle et les nuages sur le fleuron industriel qu’était l’industrie automobile s’amoncellent et le gouvernement allemand réfléchit à des mesures de soutien aux trois géants de cette industrie que sont Volkswagen, BMW et Mercedes (
L’Opinion). En effet, la presse mentionne au moins 30000 suppressions d’emplois chez Volkswagen, créant un séisme chez nos concurrents d’outre-Rhin et, par ricochet, chez les industriels français. Pour expliquer cette situation, il y a plusieurs facteurs, par exemple les lois « vertes » draconiennes de la Commission européenne qui entraînent la destruction de pans majeurs de l’industrie automobile européenne. Autre exemple, on peut citer les difficultés industrielles du virage à l’électrique des constructeurs européens, difficultés accrues par la maîtrise chinoise précoce de ces technologies et surtout, de la filière des batteries. Par ailleurs, la compétition féroce entre la Chine, les États-Unis et les états européens, avec des rapports de forces très défavorables aux Européens, n’améliore pas une situation déjà très précaire pour notre continent. Le recul des ventes de véhicules neufs dans l’électrique en Europe brouille temporairement les cartes d’un paysage industriel compliqué et en crise, car plus personne ne comprend vraiment ce que seront les évolutions des marchés européens, sinon que le pire est devant nous.
Cette situation périlleuse venue d’Allemagne pourrait prêter à sourire en France, si cette déconfiture n’avait pas d’impacts majeurs sur notre propre industrie et plus globalement, sur notre économie. Il est à craindre que notre économie et notre industrie, déjà très mal en point, pourraient subir de nouveaux coups durs, conséquences directes de la situation industrielle en Allemagne.
Le saviez-vous, il existe en France, en Haute-Savoie, un écosystème de TPE, TPI, PME et PMI de haute technicité, grand fournisseur de l’industrie automobile européenne, principalement dans le domaine thermique qui s’appelle le décolletage, situé principalement dans la vallée d’Arve, entre la frontière suisse et la vallée de Chamonix. Elle représente plus de 90 % des acteurs français du secteur. De nombreuses entreprises de cette région ont fait d’importants investissements depuis 10 ans pour rester compétitifs et technologiquement à niveau. Le fait que l’industrie automobile allemande soit malade n’est vraiment pas une bonne nouvelle car la vallée de l’Arve dépend très largement de l’industrie automobile allemande pour ses débouchés. De nombreuses entreprises emblématiques de la vallée (Bontaz, Alpentech, etc.) font face à des difficultés croissantes. Certaines de ces entreprises locales sont très dépendantes de Volkswagen. La fermeture de trois usines majeures du groupe en Allemagne va nécessairement avoir un impact significatif sur leurs activités. Des entreprises allemandes, comme l’usine de Bosch présente depuis 1947 à Marignier, dans la vallée de l’Arve, ou Poppe et Potthoff à Scionzier vont fermer d’ici la fin 2024. Leurs fermetures ont été annoncées, avec environ 150 personnes concernées pour chacun des deux sites industriels (
Les Echos 31 mai 2024 /
Le Dauphiné - 06/11/2024)
Ces TPE/PME accumulent les mauvaises nouvelles, entre les décisions visant à une décroissance non-maîtrisée poussée par les idéologues verts de la Commission européenne, l’explosion des prix de l’énergie, notamment de l’électricité, et pas qu’en raison des différentes crises géopolitiques et donc, la mauvaise santé de la filière automobile allemande susmentionnée..
En France, l’Etat a tendance à privilégier les entreprises du CAC40, et force est de constater que nos responsables politiques et administratifs (ces derniers sont très présents dans de nombreux conseils d’administrations des entreprises du CAC40) proposent un contexte législatif qui les favorisent, alors qu’elles ne représentent que 8% des emplois salariés en France. Ces entreprises du CAC 40 ne jouent pas toujours le rôle que jouent les grands groupes industriels allemands qui font vivre tout un tissu de TPE/PME implantées en Allemagne, avec le soutien du gouvernement fédéral et de ceux des Länder.
Nos TPE et PME représentent 45 % de l’emploi salarié en France mais, elles n’ont jamais été une priorité fiscale, successorale et politiques des autorités parisiennes! Avec le vote du projet de loi de finances à venir et l’augmentation quasi-certaine des impôts de production, il ne faut pas s’étonner d’une proche hécatombe parmi ces entreprises dans les prochains mois, alors qu’elles sont les premières pourvoyeuses d’emplois de notre pays.
La Haute-Savoie, département industriel avec un écosystème de TPE/PME qui était exemplaire, va subir les conséquences de l’incurie de nos dirigeants et de la manière de gérer l’industrie au niveau européen. Elle risque de payer le prix fort d’une casse sociale majeure. Nous connaîtrons la vérité des prix de cette affaire et des menaces sur notre industrie dès le premier semestre 2025.